Il est certain que des publications comme "Grand Coeur", "Story", "Héroic Albums", "Mickey magazine" "Pat", "Bravo" et "Le Petit Monde" ainsi que les déjà nommés "Wrill" et "Sabord ont eu leur importance.
La BD belge n'existe pas seulement à travers Spirou ou Tintin, elle compte aussi le souvent négligé "Tremplin" (ex "Petits Belges") de l'ex- Bonne Presse (actuellement Altiora) et chose bien évidente, il faut compter aussi avec les publications flamandes.
Plusieurs de ces dernières avaient leur équivalent en langue française : "Junior" pour "Ons Volkse" (où débuta Tibet), "Le Petit Luron" pour "' T Kapoentje". D'autres publications telles que "KZV" sont recherchées à cause de la présence de Hogarth mais celle-ci fut à mon sens bien plus importante et intéressante par la présence de Claude Marin ou de Jacovitti...
"WRILL" appartient à la grande, ou du moins importante, période de l'après guerre qui vit naître "Tintin" mais encore les "Héroic-Albums", "Story", "Jeep", "L'Explorateur", "Blondine", "Annette"...
Beaucoup de ces illustrés disparaîtront dans les années cruciales 1949/50 où une véritable hécatombe ne laissera plus en place que "Mickey Magazine" (remplaçant "Story"), "Spirou", "Tintin", "Héroic-Albums", "Petits Belges", "KZV" et "Uns Volkse".
Durant cette décennie la dure loi de l' édition trouera encore des brèches importantes dans ce peloton déjà aminci.
Contentons nous d'examiner aujourd'hui les destinées de "WRILL" et de "SABORD",que l'on pourrait en certain sens comparer, ou plut8t mettre en para11èle, avec "Coq-Hardi" en France. C'est un parallèle audacieux, certes, mais non dénué de sens, vu la qualité de ce que "WRILL" osa présenter en sa brève carrière. L'histoire de l'hebdomadaire "WRILL" mêle intimement les noms de deux familles liègeoises: Gordinne d'abord, Hemmerlin ensuite qui firent des Éditions Gordinne une société de famille spécialisée dans l'imagerie populaire. Charles Gordinne était un industriel qui dans les années 30 exploitait une usine sise rue Méan, bordant le quartier d'Outre-rieuse entre la place Delcour et le quai de l'uurthe. Pour occuper les 150 ouvriers, et à cause de la crise industrielle, il décida de se convertir dans l'édition, tout d'abord en reprenant un fond d'éditeur de Bruges, ensuite en réussissant à s'implanter sur le marché français.
Albert Hemmerlin, de son côté, avait perdu son père à l'âge de quatre ans et sa mère se remaria avec Charles Gordinne.
Pendant la guerre, alors que l'édition se limitait à imprimer des images populaires genre Epinal et de petits albums bon marché, il y eut fusion avec l'imprimerie Protin-Vuidar. Les iditions Gordinne ou plutôt CHAGOR devinrent alors la SIREC, Société d'Impression de Rotatives En Couleurs, ce qui permit d'imprimer en offset.
Albert Hemmerlin possèdait la majorité des parts mais ses associés s'empressèrent après-guerre de récuperer les autres parts afin d'obtenir en fin de compte la majorité contre nemmerlin et remercier celui-ci. Ayant toutefois un contrat d'emploi de direction hemmerlin eu le temps de se retourner et de refaire de l'édition enfantine, toujours en accord avec ses clients français mais sous le nom d'édition Hemma (cette maison d'édition existe tou¬jours ; elle est établie à Chevron en Belgique et travaille toujours selon le principe du livre pour enfants à bon marché). Quant à la SIREC, elle disparut dans une banqueroute totale.
Pendant la guerre Chagor s'interessa au dessin animé style Disney tel que le lui proposa le liégeois Paul Nagant ; Hemmerlin et Chagor imaginant pouvoir refaire le même coup qu'ils réussirent dans le monde de l'édition. Il faut se dire que les albums Chagor se vendaient comme des petits pains de par leur diffusion française, non pas tant par les canaux de distribution ordinaires mais bien par l'entremise des "Prisunic" principaux consommateurs de ce produit bon marché.
En réalité la maison d'édition Gordinne s'était laissée embobiner par Paul Nagant qui lui avait soumise quelque mètres de pellicule, extrait d'un Disney quelconque. Chagor finança alors un studio de dessin animé placé sous la férule de ce Nagant. Il y eut brouille et le premier assistant de Nagant, ALBERT FROMANTEAU (et non pas FromEnteau) continua l'affaire (Cinémation, Ciso 23, Brabancia Nostra, 1977).
Son studio se developpa, compta pas mal d'assistants et réalisa trois films avant qu'un incendie le détruisit de fond en comble. A ce moment là fromanteau avait mis en chantier un quatrième film qui aurait dû être accompagné par l'orchestre à la mode de Ray Ventura (dont faisait partie Henri Salvador !). Le troisième film ayant été lancé avec vision et conférence de presse, etc.. Il est certain, qu'au départ, la firme Chagor avait compté sur ces dessins animés centrés sur le personnage de Wrill le renard (personnage inventé par Madeleine Charlier) pour entreprendre un vaste "merchandising" à la walt Disney. Il y eut des bandes dessinées, des ABCdaires, des albums à colorier...
Mais les films étaient encore malhabiles, ils n'eurent qu'un succès relatif et ce fut l'inverse qui se produisit. Ayant accumulé pendant l'occupation un stock considérable de BD, ayant été approché, d'autre part, par des amis d'Hergé, Chagor se lança (sans Hergé) dans la BD, utilisant les assistants du studio de dessin animé plus un considérable contingent de dessinateurs français pour lancer en deux versions (française et néerlandaise) un des tout premiers hebdomadaires sur le marché.
A la sortie de l'hebdomadaire, Albert Fromanteau est nommé directeur artistique, fonction liée toutefois à ses yeux avec la mise en place d'un nouveau studio de dessin animé. Les efforts de Fromanteau n'aboutissant guère, il quitte alors la firme SIREC. On connait la suite.
Un détail à noter : un studio complet, équipé et tout, fonctionna en pleine occupation. Il faut croire que Chagor eut les moyens de l'entretenir, puisqu'aussi bien le rendement ne devint effectif que dès la libération. I1 faut d'une façon ou dune autre que Chagor, avec ou sans Protin-Vuidar, ait eu les moyens de vivre ou survivre sur les publications et produits issus de l'édition pendant l'occupation, même compte tenu du fait que ni les assistants, ni Fromanteau, n'aient été payés selon les barêmes syndicaux...
Voilà, très schématisée, l'histoire d'une importante maison d'édition qui lança un journal exploitant une double veine : d'une part de nombreux ta¬lents locaux, souvent malhabiles mais d'une fraicheur inattendue, et d'autre part la patte professionnelle des dessinateurs français dont Le Rallie et Marijac, tous auteurs, qu'Hemmerlin s' attacha lors de ses nombreux contacts parisiens.
Voyons maintenant plus en détail l'histoire de "WRILL" et de "SABORD".
Voici le texte de présentation de la page un :
"Bonjour! Je suis Wrill, je suis la bonne humeur, la joie, le rire.
Cependant j'ai été créé pendant l'occupation par une troupe de jeunes
dessinatrices et dessinateurs réfractaires, en butte aux
poursuites continuelles de la gestapo.
L'enthousiasme de ces jeunes, dirigés par Albert Fromenteau (sic),
également réfractaire et Commandant d'un groupe de la Résistance, a fait
de moi le héros au grand coeur de ce journal et du dessin animé".
WRILL ne comptait alors en effet que 4 pages dont la une et la
quatre en couleurs. La bande supérieure présentait "WRILL" en médaillon
avec sa queue de renard et son chapeau pointu suivi du titre en rouge
sur fond jaune. En sous-titre l'annonce "Hebdomadaire des jeunes !" en
lettres blanches sur fond bleu. Sur le premier dessin de couverture Wrill
s'adressait aux jeunes lecteurs dans les termes repris plus haut tandis
que deux bandes jaunes encadrant Wrill et divers personnages, petits
animaux, (du dessin animé "Le voyage imprévu") reprenaient également
diverses têtes d'animaux.
Dès le départ il y aura une édition néerlandaise vendue au même prix en Belgique et pour 25 cents en Hollande. Wrill fut d'ailleurs très bien reçu par la presse catholique flamande, mieux même que Spirou et bien d'autres encore.
En page deux paraît l'éditorial suivant :
"Chers Amis,
Wrill le renard vous a dit en quelques mots, en première page, ce qu'il
était.
En ce premier numéro, permettez-nous de vous le présenter plus longuement.
A Liège, pendant l'occupation, quelques jeunes
filles et jeunes gens, dessinatrices et dessinateurs de l'imprimerie Chs
Gordinne et fils, tentèrent de réaliser des dessins animés.
Toutes et tous, à cette époque, devaient partir en Allemagne, travailler
pour l'ennemi. Aucun ne le voulut ; aussi dans un garage désaffecté, avec
un matériel de fortune, ils se mirent au travail, bien décidés à échapper
aux boches.
Le dessinateur Albert Fromenteau, un jeune lui aussi, était et est resté
le chef de cette équipe ; en même temps, il dirigeait une autre équipe,
combien plus sérieuse : il était Commandant d'un groupe de la Résistance.
Maintes fois, ils durent interrompre leur travail pour se cacher, car ils
devaient toujours craindre les dénonciations, les rafles ; alors ils
disparaissaient quelques jours. Pourtant, malgré toutes ces difficultés,
ils menèrent leur entreprise à bonne fin et vous verrez sur les écrans
de nos salles de cinéma leur film "La Captive de Frok'Manoir", dont le
héros est Wrill.
L'imprimerie Che Gordinne et fils eut alors l'idée, pour vous distraire
et aussi, nous l'espérons, pour vous instruire, de créer le journal
"Wrill" ; pour cela elle fit de nouveau appel à cette même équipe
et à d'autres dessinateurs français et belges.
Hélas les difficultés d'approvisionnement sont énormes et notre journal,
faute de papier, ne parait que sur quatre pages, mais de grand format.
Dès que nous le pourrons, nous en ajouterons,oar notre programme est
vaste et nous voulons que "Wrill" devienne le journal préféré
des jeunes.
Nous vous raconterons la vie des héros que vous connaissez et aussi celle
d'autres, inconnus encore de vous, qui furent ceux du maquis en France
et en Belgique.
Nous répondrons à vos questions par un courrier qui prendra place dans
notre journal.
Pouvons-nous vous demander aussi de nous aider à faire connaitre "Wrill"
en le montrant à vos petits amis et en le propageant dans votre
entourage ? Nous l'avons créé pour les jeunes et nous avons voulu
précisemment pour eux, qu'il soit intéressant, instructif et amusant.
Nous travaillons pour vous offrir chaque semaine, une série
d'historiettes illustrées divertissantes à la fois et pour les garçons
et pour les filles. Lorsque nous ne serons plus limités par la question
de papier, denrée assez rare actuellement, nous créerons de nouvelles
rubriques qui feront de "Wrill" votre hebdomadaire préféré.
Nous faisons le voeu que ce dernier vous plaise et, dès maintenant, rien
ne peut nous être plus agréable que de recevoir vos critiques, vos
suggestions, et, nous l'espérons, vos louanges aussi.
La Rédaction"
Déjà il apparait que la mise en page fut bâclée. Elle parait en tout cas assez fantaisiste car les deux pages centrales ne contiennent pas moins de 8 BD !. Pour commencer, page deux en haut "Les inventions du professeur Azimuth" par l'extraordinaire dessinateur français Henry Le Monnier. "Prof Azimuth" est un savant dont il est inutile de dire qu'il est génial et dont les petits neveux viennent égayer la solitude tandis qu'un gros, grand et méchant bandit menace leur quiétude.
En dessous de cette série au style schématisé, "Jim Spitfire en campagne", une BD typique de Max Day (alias Max David). A gauche de celle-ci et en dessous "Roger la bagarre", excellente série de guerre d'Al Peclers, mais à l'époque restée anonyme. Exception faite pour la série guerrière de Le Rallie cette BD restera la plus humaine et la mieux documentée sur cette époque trouble. Enfin dernière BD sur cette page (à côté de Roger la bagarre): "Reflexions de M.Bignou" qui viendra en alternance avec "Porcinet 1e petit cochon rose" de Mat.
Sur la trois, en haut, à gauche: "Alerte les Jivaros", du français Georges Bourdin et à sa droite la rubrique "Notre escadrille" par "Pilote". En dessous, à gauche : "Barigoule detective" par Marijac, suivi à droite par "Josette et son chien " de G. Lauve et une BD de Le Rallic : "Les foulards noirs", interminable western.
Page 4 enfin, bien encadré par deux bandes jeunes, "Mustang", série de guerre en couleurs vives dues à Charles Gilbert, professeur de dessin, exploitant un studio à Liège et signant les oeuvres de ses divers collaborateurs sous des noms aussi divers que "At-Gill", "Atgil", "Chargil", "Imagil" etc...
C'est dans le n° 2 que démarrent les aventures de Wrill, "Un voyage imprévu", dessinées par Albert Fromanteau et son équipe (le style particulier de Fromanteau est nettement reconnaissable).
A partir du n° 9 la mise en page devient de plus en plus brouillonne. "Mustang" passe en page de couverture, "Wrill" passe en dernière page en même temps qu'une nouvelle série "Nina" d'un certain Simy avec, en plus, un stop-comic sans titre. Cette fois la présentation ne bougera plus jusqu'au no 20 où l'on en viendra au format standard et plus habile de 20 x 29, toujours pour le même prix mais sur 12 pages.
A noter que le stop-comic de la dernière est remplacé au n° 16 par "Les joyeux marins et Jo" de Marijac.
Voici donc le format définitif de WRILL :
En page de couverture le titre demeure identique et apparait le début de "La tourmente" premier épisode de Bernard Chamblet par Le Rallie (en couleurs bien entendu). En page deux "Le maquisard" (rubrique) et la BD "Jim Spitfire" se partagent l'espace. En trois, "Suzel la petite alsacienne" de JP. Pinchon suivie à la quatre par quelques rubriques et le stop-comic de "Monsieur Myro prestidigitateur " par André Rigal, mais non signé, et "Barigoule" de Marijac. A la cinq "Les foulards noirs" et "Les inventions du professeur Azimuth". Les pages six et sept sont en couleurs et présentent de gauche à droite: "Tommy Time" de Max Day, "Mustang" et "Lyne et Zoum" encore une petite série de Marijac. La page 8 donne une partie rédactionnelle ainsi que la suite "Alerte les Jivaros" et le stop-comic de "M. Bignou" toujours en alternance avec "Porcinet". Page neuf débute "mission spéciale" de l'encore hésitant Valentin. Dix est une page rédactionnelle et la onze nous donne la suite de "Josette" et de "Roger la bagarre". Enfin, la page 12, en couleurs nous ramène à Wrill toujours empêtré dans son "voyage imprévu".
La BD "Nina" sera ainsi interrompue et ne resurgira qu'au n° 31 pour s'arrêter au n° 48.
La BD de Wrill s'arrête quant à elle au n° 26 et sera alors remplacée par des planches à gags en attendant le début d'une nouvelle aventure.
Dans le n° 31 apparaissent "Dig et Dag, vagabonds" de J. Closter ainsi que "Jehan Niguedouille" de Al Peclers, bande humoristico-chevaleresque assez malhabile et inférieure à son style réaliste de "Roger la bagarre". Au n° 33 débute "Mizo, Friquet et Cie" dessinée par Bruno dans un style très schématisé. C'est à ce numéro que Wrill passe sur 16 pages ! Le prix demeure inchangé. L'extension bénéficie surtout la partie rédactionnelle qui comprend maintenant outre un feuilleton "La légende d'Edmond Thieffry par A. Morel, un grand concours, la rubrique de l'oncle Charles, la boîte à lettres de la cousine miche (il s'agissait de melle Le Salmon,bras droit de Albert Hemmerlin, qui répondait au courrier) En envoyant deux photos, les lecteurs recevaient leur carte d'adhésion "Pilote" qui donnait droit à des épingles.
Côté BD "Wrill écoute la BBC" démarre sa deuxième aventure, basée sur le dessin animé, au no 37.
Domaine nouveauté on note l'apparition de "Bill Yar" (no 47) par Rapha Bolsaie, ancien collaborateur de Fromanteau pour le dessin animé. Il se lança par la suite dans le secteur publicitaire et devint assez curieusement le beau-frère de Bob de Moor, sa fille épousant un des fils de celui-là ! Ils habitent d'ailleurs tous les deux à Uccle, commune de Bruxelles, à peine à 500 mètres l'un de l'autre ! C'est par l'entremise de De Moor et grâce à Bolsaie que je retrouvais plus tard la trace de Fromanteau...
La présentation et la mise en page demeurent fantaisistes et changeantes mais la première année s'achève de façon positive. Dans le N° 50 disparaissent les "Foulards noirs" au profit du "Mystère de l'Atome 1" du dessinateur français Cazanave (encore un français et quel dessinateur !) tandis que dans le n° suivant Mat nous livre "les farces de Tutur et Tatave" dont l'humour est corrosif à souhait.
Le n° 52 célèbre le 700° anniversaire de la Fête Dieu à Liège et en page II apparait une BD de R. Bailly-Genet "Ursule, Pic et Cani". Enfin dans le même numéro en page neuf une nouvelle aventure de Wrill qui "découvre une planète", ce sera une des plus originales histoires de la série.
Nous voici mi-1940. un notera l'important apport des dessinateurs français, en général nettement supérieurs du point de vue graphique (plus professionnels) que leurs collègues belges. Excepté Fromanteau et Bolsaie, l'apport belge se distinguant surtout par des séries de guerre (Mustahg, Roger la bagarre, Jim Spitfire) mais Cazanave, Marijac, Mat, Bourdin, Chott, Pinchon, Le Rallie et Le Monnier dominent par la qualité.
Signalons encore que c'est dans le n° 51 de la 1ère année que se termine la première partie de Bernard Chamblet. "Le Maquis" seconde partie débute dans le n° 52 et se terminera au no 76 tandis que "La Libération" suivra dans le no 77.
La seconde année nous apporte quelques nouveautés. Tout d'abord au n° 53 une nouvelle bande d'humour schématisée "Cap'taine Sabord" par le français André Rigal, intitulée "L'île mystérieuse". On découvrira par après une copie d'un dessin animé portant le même titre, nous y reviendrons. Le début est assez incohérent et la bande comprend des sous textes ainsi que des textes incorporés, mais cette série, ce style et ce dessin connaîtront, parait-il, un succès immédiat auprès des jeunes.
Dans le n° 65 nouvelle série encore avec "La jeunesse de Marius", série de Thomen, dans l'ancien style et avec des sous-textes (probablement reprise d'un album). Dans le n° 69 démarre une nouvelle série de Chott "L'Or des Omahas", un western, qui passe en dernière page et en couleurs. "Atome 1" de Cazanave se termine au n° 72 tandis que débute "Albert au pays d'Allah" de Jean-Claude sur texte de Jean Grégor. Le feuilleton est, quant à lui remplacé par un roman de science fiction de R.Kulawik (illustré par l'auteur) qui ira du n° 81 au n° 145 (l'illustration sera reprise par Imagil).
Quelques nouveautés encore : "Jo Bart" de Max Day (dessin) et Jo Jim, "Le navire aux cent visages", de Ch. Burnet (à/c du n° 82), etc...
Début 1947 Chott démarre avec "Mowg, fils de la brousse" (no 85), série archi-connue qui passe en couleurs et en dernière page.
Sabord quant à lui termine ses aventures dans le no 82 de "Wrill" pour la bonne raison qu'il devient vedette d'un illustré à part dont nous parlerons ultérieurement.
A la fin de sa seconde année WRILL s'essoufle un peu et semble avoir perdu de ses plumes. Nous sommes en plein 1947. Si WRILL a tenu bon en 1945/46 et probablement mieux marché que "Spirou" ou même "Tintin" (tout comme Bimbo qui, à ses débuts, marchait légèrement mieux que "Spirou") les illustrés incriminés semblent maintenant avoir rattrappé leur retard. En vérité "Tintin" avait démarré,souvenons nous en, avec une équipe réduite à quatre dessinateurs, tandis que, excepté Sirius et Jijé, "Spirou" ne possédait pas encore de talents bien rodés.
Seuls Bimbo et Wrill par leur diversification, leur fraîcheur initiale et la variation des thèmes plurent d'emblée au public, d'autant plus que les dessinateurs français, plus chevronnés, faisaient la pluie et le beau temps dans WRILL...
Une fois que "Spirou" et "Tintin" eurent rattrappé leur retard - et "Tintin semble avoir joui plus rapidement d'un éclatement de son talent propre : Hergé, Jacobs, Laudy et Cuvelier - ils dépasseront "Bimbo" et "Wrill", ainsi que "Bravo" où les seuls Laudy et Tenas-Rali ne suffisent pas à alimenter un sommaire déjà en perte de vitesse....
Toutefois si "WRILL" connaît un léger passage à vide en cette année 1947, il se rattrappe lui aussi et livre un fameux baroud d'honneur avant de sombrer.
Aux environs du n° 100 on note une première saignée avec l'absence de Fromanteau. Ce dernier reviendra par la suite avec quelques BD animalières, dans son style habituel, mais non plus comme directeur artistique. La seule nouveauté interessante à l'époque étant la nouvelle série de Henry Le Monnier qui démarre au n° 103 sous le titre "Jean d'Armor" magnifique série de science fiction avec la découverte de l'Atlantide, dans un style en pleine maîtrise.
La troisième année introduit également Gervy qui sévit déjà dans "Petits Belges" (actuellement Tremplin) de la Bonne Presse d'Averbode. Il reprend ici son "Bobby, reporter" (qui par la suite réapparaîtra dans "Petits Belges").
Avec la fin de la trilogie "Chamblet dans le maquis/la tourmente/la libération", Le Rallic disparait quelques temps.
Au n° 109 Chott démarre avec "Buffalo-Bill" mais les choses vont évoluer dans le bon sens dès le n° 113 avec le retour de Fromanteau qui dessine une dernière histoire de Wrill ("Wrill et le fant6me de Castelperdu"). Dans le n° 121 Le Rallic revient avec une variante d'"Animal Farm" d'Orwell : "Révolte à la ferme", un petit bijou (à rééditer).
Dans le n° 123 Fromanteau dessine "Pouss Pouss", série animalière encore et dans le n° 125 " Jehan Niguedouille" de Peclers revient lui aussi. N'oublions pas "Gringalou" par JP. Pinchon (texte de J. Noé) depuis le n° 99 et "L'île à eclipse" de Bourdin depuis le n° 115.
Max Day est de nouveau de la partie avec "Les aventures de Marius Jolivent" sur texte de Madeleine Charlier. "Jean d'Armor" lui, se termine dans le numéro du 15 janvier 1948. Pour sa troisième année d'existence "WRILL" indique enfin la date de parution sur la couverture (no 85 du 13 février 19¬47).
Quelques nouveautés encore : Rapha Bolsaie nous livre une série réaliste "Les diables de la Steppe" (numéros 137/155). "Wrill" reparaît en planches à gags cette fois, de nouveau en compagnie de son chien Nonolle. Le n° 147 nous introduit une nouvelle série de science fiction "Telluro City " par Louky. Le Rallic nous revient dans le n° sui¬vant avec un western où l'on retrouve Yan kéradec: Le coffret de cuir". Au n° 152 Wrill disparait et la semaine suivante l'en-tête change et nous donne un renard plus réaliste de dessin mais aussi moins personnel. C'est à ce moment-là que se situe le tournant de l'hebdomadaire dont l'édition néerlandaise - premier coup de semonce - descend de 16 à 8 pages ! La version néerlandaise devient d'ailleurs un ramassis, une concoction de la version française ainsi que de "Sabord".
A partir du 156 voici Pinchon en première page avec "Olive et Bengali", en deux une page rédactionnelle, en 3 figure "Texas Jim" plus du rédac¬tionnel, en 4 "L'Homme transparent", très belle histoire fantastique de Billicta, en 5 "Jehan Niguedouille", en 6 "Marius Jolivent", la 7 est encore du rédactionnel, la 8 "Mizo et Friquet" et la 9 "Popome Boy scout" de Rigal, la IO et la 11 le roman "à suivre" "Don Quichotte", la 12 "Telluro-City", la 13 "Filou, le petit lutin", 14 et 15 sont des pages rédactionnelles, et en 16 "Le coffret de cuir" par Le Rallic. Soit 1O BD mais quand même 5 1/2 pages de rédactionnel assez brouillon. Le choix des BD présente peu de variations, peu de choses de grandes valeurs, exception faite bien entendu pour Rigal, Le RalliC et Pichon, soit encore et toujours l'apport français.
On note avec regret l'abandon de Fromanteau qui se tourne vers la publicité et l'illustration.Pendant des années Fromanteau essayera vainement de revenir en professionnel au dessin animé. Il croira son heure venue quand il sera contacté par Raymond Leblanc et introduit chez Belvision. On lui promet la place de directeur artistique. On se quitte sur une poignée de main fraternelle et puis on attend... l'affaire se terminera par une lettre signalant à Albert Fromanteau que suite à une analyse graphologique il ne convient pas... Qui torpilla la carrière de Fromanteau chez Leblanc, nul ne le sait, mais il est en droit de se poser la question. D'autant plus qu'il existe une autre histoire assez invraisemblable entre Fromanteau et Paul Nagant (encore une fois, je renvoie à CISO n° 23 "Cinémation" pour plus de détails. Allez donc demander à un artiste de bâtir une oeuvre dans un tel manque de sérénité ! Il apparait de plus en plus que Fromanteau a raté le coche et qu'il aurait pu devenir, non pas notre Walt Disney, mais au moins un artiste reconnu pour sa juste valeur, ce qu'il n'est toujours pas.
Pour avoir revu les anciens films de Fromanteau nous savons maintenant qu'il est capable d'excellentes choses. C'est tant mieux puisqu'il compte maintenant se remettre au dessin animé et prépare activement un court-métrage d'une beauté plastique bien évidente.
Revenons à WRILL hebdomadaire. Démarre la 4° année le 1er juillet 1948 avec le n° 157 et les séries dont nous avons déjà parlé. Au n° suivant A. Rigal livre "Toutoune et Réséda" et au n° 167 apparait "Leila fille de corsaire" par Maitrejean, série semi-réaliste pour le dessin, très réaliste pour le contenu. Au n° 169 se termine "L'homme transparent" de Billicta. Ce même dessinateur nous donnera une autre histoire fantastique dans "Sabord". Enfin At-Gil, l'éternel Charles Gilbert,livre une histoire de SF "Le secret de l'île" à partir du n° 168 tandis que Le Rallic livre des gage de "Nicou". Wrill quant à lui revient dans le n° 170, cette fois dessiné de façon réaliste par J.P Pinchon, et dans une histoire policière "L'opale synthétique", très médiocre. En novembre Le Rallic revient en force, non seulement avec de nombreuses illustrations mais avec la suite de Bernard Chamblet envoyé cette fois en Indochine "Mission au pays jaune" tandis que dans le n° 187 "Le poignard d'or" succède au western "Le coffret de cuir".
Enfin au n° 181 débute "Wagram", grande fresque épique et en couleurs d'Albert Bailly. A partir du n° 183 de grands dessins remplacent la BD de couverture. Ce numéro étant d'ailleurs un spécial de 24 pages où débute "La cité fantastique" série de science fiction assez bonne, encore que pas mal copiée sur EP.Jacobs. L'auteur en est Jacques Martin qui signe Marleb. Elle parait en très belles couleurs et passera même en page de couverture pour se terminer au n° 196.
Dans le n° 184 At-Gil revient encore une fois à la 3F avec "Terre ignorée". Enfin au n° 186, Jean Porterie, le lauréat d'un concours de BD reçoit sa grande chance avec la publication de son histoire "France au combat", série de guerre en noir et blanc terriblement influencée par les séries parues durant les deux premières années de Wrill.
WRILL débute l'année 1949 en grande pompe et passera à partir du 27 janvier sur 24 pages (NDLR : il semble que l'édition française soit restée sur 16 pages à partir de ce n° 187) mais c'est hélas le début de la fin, toutefois difficilement prévisible à ce moment là.
Nouvelles séries ? "Vivette à l'aventure" par Jacqueline Henrard, ancienne collaboratrice de Fromanteau et épouse de Rapha Bolsaie, "les flibustiers de la Jamaïque" par le dessinateur français H.lselin, "Jean et Jo" par Marijac, Pinchon et Le Rallic toujours présents, Valentin qui revient avec "La vallée maudite", enfin Bolsaie lui même avec "La patrouille des cerfs", sa meilleure oeuvre....
Paraissent à ce moment là des textes de Plancy & Charles Deullin tandis que Fromanteau livre son chant du cygne avec "Cric et Floc joyeux compères'. Dans le n° 194 voici Joe Hammen avec une BD "Les héros du Texas". "Terre ignorée" se termine au n° 197. Particularité troublante, le savant de cette mièvre histoire s'appelle Tournesol. Bien que dessinée à cent pour cent dans le style At-Gil cette BD est signée Vincent.
On se souvient qu'à ses débuts le prix de Wrill était de 3 francs belges puis 3,50. Au n° 151 il passera à 4 francs et au 186 à 5 francs belges. Enfin le n° 204 du jeudi 26 mai 1949 est vraisemblablement le dernier paru.
WRILL a donc tenu bon pendant 4 annees mais à ce moment-là, la tête du renard a déjà disparu sur la page couverture où ne figure plus qu'un grand dessin, la 2 et la 3 étant des pages rédactionnelles, 4 et 5 présentent "Vivette à l'aventure", 6 et 7 un roman feuilleton de G. Aymard, la 8 Le Rallic avec' "Le corsaire des îles sous le vent" qui débute dans ce no 204, la 9 "Gringalou chez les brigands" et la 10 du rédactionnel tandis qu'à la 11 "La vallée maudite" comme les autres séries restera inachevée, en 12 et 13 "L'homme aux mains d'acier" de Le Rallic, à la 14 "La patrouille des cerfs", à la 15 "Cric et Floc", à la 16 "Nine et Yette" de Marijac, à la 17 "Olive et Bengali au pays ces légendes" par JP. Pinchon, un des meilleurs épisodes de cette série, la 18 et la 19 des pages rédactionnelles, à la 20 "Mizo et Friquet" de Bruno, à la 21 "Tutur et Iatave" de Mat, la 22 encore du rédactionnel, à la 23 la série de Porterie et à la 24 "Wagram". "Le héros du Texas" ayant été interrompu au numéro précédent bien que portant l'annonce d'une nouvelle série "Les cavaliers fantômes". Certaines de ces séries parurent néanmoins en albums.
La SIREC continuait effectivement la politique d'albums des éditions Gordinne commencée bien avant la guerre (avec également des albums à colorier, abcédaires, etc..) albums noir et blanc et albums en couleurs qui permirent à Fromanteau, Le Monnier, Pinchon, Le Rallic surtout de connaître très rapidement la gloire de ce côté là. Longtemps après la chute de l'hebdomadaire ces albums continuèrent à paraitre de même que les albums de numéros reliés d'anciens WRILL et SABORD. Les invendus étaient dès le début reliés en recueils cartonnés. Les derniers numéros furent toutefois lancés sur le marché selon une présentation brochée à bon marché.