De John Flanders on ne connaissait pas davantage le nom ni la réputation souvent
douteuse qu'il traînait derrière lui. John Flanders n'était qu'un des principaux noms
de plume de Raymond Jean Marie De Kremer (1887-1964), auteur Gantois connu comme
auteur fantastique sous le nom de Jean Ray. Quasi oublié à l'époque, il sera réédité
chez Marabout, grâce à Henri Vernes et connaîtra une gloire tardive peu avant son décès.
Il s'était entretemps construit de toutes pièces une réputation d'ancien marin au grand
large, contrebandier du temps de la Rum Row, ancien dompteur de fauves et dont le
Tout-Gand se moquait éperdûment, connaissant le lascar qui, en réalité, avait passé
quelques années à l'ombre pour une sordide histoire de détournement de fonds. Soit.
J'ai connu l'homme, tardivement certes, mais c'était un personnage et un homme affable
et aimable, qui avait un don particulier : il savait torcher des histoires et ne
s'en est pas privé. Devenu un galérien de l'écriture, il a pondu sa vie durant des
histoires fabuleuses, contes fantastiques, récits policiers dont les Harry Dickson,
romans pour la jeunesse, feuilletons innombrables...
Lisez les deux volumes que lui a
consacré son biographe, Geert Van Damme, c'est fa-bu-leux !
Devenu par nécessité auteur pour la jeunesse chez la Bonne Presse d'Averbode dès 1931, Flanders avait entamé dans les petits fascicules Presto Films et Vlaamsche Filmkens le début d'une oeuvre alimentaire certes mais d'une prodigieuse vivacité et imagination !
Avant guerre déjà il entama également une carrière de feuilletoniste pour la jeunesse. Si dans l'éphémère Ons Kinderland il ne livre qu'un seul feuilleton, tout comme il fera dans Wonderland, supplément pour la jeunesse dans De Dag, il se déchaîne par contre dans l'hebdomadaire Bravo (uniquemment en néerlandais) où outre les contes et nouvelles il livre de 1936 à 1940 pas moins de 22 feuilletons (!) divers, récits d'aventures et surtout récits policiers, adaptations néeerlandaises de ses Harry Dickson où ce dernier est remplacé par Edmund Bell, détective de 16 ans !
Cette activité sera reprise dès la libération, non plus pour Bravo mais pour Petits Belges et Zonneland , hebdomadaires dits confessionnels de la Bonne Presse d' Averbode où il reprend ce genre de suractivité avec contes, nouvelles et rubriques diverses (dont celle du Capitaine Bill) et quelques feuilletons (Slumber Valley/La Vallée du Sommeil) et livrera des scénarii de BD pour Herckenrath, Gray Croucher, Buth, René Demoen et François Craenhals, sans oublier de publier quelques romans excellents en volume, dont le superbe "Geheimen van het Noorden".
Il continue cette activité dans 't Kapoentje et sa version française Le petit Luron, encore qu'il ne livre ici que de histoires courtes et très rarement des histoires à suivre. On retrouve encore sa signature (ou ses signatures) dans Samedi Jeunesse et dans Tintin, ce qui fait que John Flanders sera plus connu des jeunes lecteurs, avant que ne rejaillisse toute la gloire littéraire sur son oeuvre fantastique parue sous le nom de Jean Ray.
Quant à ses feuilletons dans la période d'après guerre on les retrouve dans des hebdomadaires familiaux tout public (Averbode's Weekblad, La Semaine d'Averbode, Samedi, Zondagsblad, etc) bien plus que dans les illustrés pour les jeunes, exception faitre pour Zonneland/Petitis Belges.
Prochain chapitre : Yves Duval